AUX HORIZONS DU SUD

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Sur VENI, VIDI, VIXI :
Le titre du chapitre est une phrase latine, VENI, VIDI, VIXI, qui veut dire "Je suis venue, j’ai vu, j’ai vécu", jeu de mots sur la citation de César "Veni, vidi, vici" qui signifie "Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu"("vici" remplacé par "vixi").

Sur "AUX HORIZONS DU SUD"

 Les "horizons du Sud" symbolisent métaphoriquement tous les méprisés, minorés, considérés comme infra, inférieurs, comme dans le rapport discriminant Nord/Sud.

 Ce poème a intentionnellement peu de ponctuations, le minimum possible à l’intérieur des vers, et quelques-unes, parcimonieusement, en fin de vers, pour mieux coller au métissage, au fluide des mélanges, à la fusion, sans trop de séparations.

 "Couleur, chaleur et mêmes odeurs" :
Ce vers est inspiré par l’expression « le bruit et l’odeur » employée en 1991 par Jacques Chirac, alors président du RPR et maire de Paris, lors d’un discours portant sur la politique d’immigration française, expression qui désignait des désagréments supposément causés par les immigrés en France, rappelée comme témoignage des conceptions racistes qui imprègnent nombre de personnalités politiques ne se réclamant pourtant pas de l’extrême-droite.

 "Nous autres, aux horizons du Sud" :
Nous autres = les petits, les faibles, les opprimés, les discriminés, les exploités etc. Dans "nous autres", "autres" ne fait que renforcer le "nous" en marquant une notion de différence, sans que ce soit trop emphatique, mais en insistant sur la cohésion du groupe ; on n’appuie pas tant sur la différence avec les autres que sur l’unité — idéale ! — de l’ensemble de gens réunis dans "nous autres". Ce serait plus plat, si j’avais écrit seulement "nous" ; ça n’aurait pas rendu cette notion de communauté dans le bon sens du terme — sans communautarisme à outrance ; "nous autres" est familier, paysan, régional, on ne l’utilise pas en France autant qu’au Québec. J’ai fait exprès de l’employer ici, car ces personnes "aux horizons du sud" ne parlent pas une langue soutenue…

 "Ne pas retomber en enfance
Ne pas voir misère en En-France"

"Ne pas retomber" et "ne pas voir" sont à l’impératif, et les sujets (sous-entendus) sont "nous" tous, tout le monde, tous ceux qui subissent une oppression, une discrimination. Allusion au fait que certains racistes disent que les Noirs sont de grands enfants, qu’on les tutoie, qu’on est paternaliste envers eux, qu’on les infantilise etc…

 "En la Troisième Ile, Ile-de-France" :
Encore un jeu de mots : l’Ile-de-France c’est la région parisienne, qu’on peut considérer comme la "Troisième Île" car beaucoup d’Antillais y habitent : originaires de leurs deux îles, Martinique et Guadeloupe, ces "insulaires" constituent une "Troisième Île" en banlieue parisienne.

 "Et seuls
Et seules
" :
Hommes et femmes seuls chacun de leur côté : cette répétition vise à insister sur la solitude des personnes de chaque sexe.

 "Vent-menés par Traite et trafic" :
"Vent-menés" veut dire "amenés par le vent".

 "Quimboisés par toutes leurs polices"
Quimboisé (en créole tjenbwazé)= envoûté, ensorcelé.
Nous — les petits, les faibles, les opprimés, les discriminés, les exploités etc. — sommes envoûtés, manipulés, parfois malmenés, violentés, voire déportés, décimés, exterminés, sacrifiés, victimes d’holocaustes, offerts en sacrifice sur divers autels, réduits en esclavage etc., par "leurs" polices, c’est-à-dire les polices des oppresseurs, des puissances d’argent, du pouvoir politique, des grands de ce monde, au service de l’injustice, de l’inégalité, de la loi du plus fort…

 "Leurs leucodermes démonades" :
Mauvaises actions dignes de démons, machinations démoniaques au nom de la pseudo-supériorité de la race blanche et aryenne. (Le mot « leucoderme », du grec λευκο−, blanc, et δερμο−, peau, signifie « blanc de peau », « à peau blanche ».)
À partir du vers 23 on a une métaphore de l’ensorcellement (« Envoûtés », "Quimboisés"), avec l’actif (« démonades » signifiant « actions démoniaques » des Blancs, les « leucodermes », du grec λευκο−, blanc, et δερμο−, peau) et le passif (« Envoûtés », « quimboisés », participes passés, voix passive) : les « gens de couleur » sont « quimboisés », « envoûtés », ensorcelés, possédés (par le diable), les forces de « police » apparaissant comme des démons dotés de pouvoirs démoniaques, maléfiques, capables de les retrouver n’importe où grâce à la sorcellerie des moyens d’investigation et des nouvelles technologies qui sophistiquent les enquêtes, les espionner, les prendre en filature, les mettre sur écoutes, les filmer, les enregistrer etc., et, pour finir, les posséder, les avoir à leur merci, faire d’eux ce qu’ils veulent).

 "Vaudou sur nous !"
"Nous", les petites gens de tous horizons — les "horizons du sud" symbolisant métaphoriquement tous les méprisés, minorés, considérés comme infra, inférieurs, comme dans le rapport discriminant Nord/Sud —, nous sommes zombifiés, soumis à la volonté des puissances mauvaises, maléfiques, comme si elles nous avaient jeté un sort ; nous sommes transformés en zombies, broyés par des machines diaboliques.
Ouh la la ! Quel tableau ! Mais est-ce que j’exagère tant que ça ?… Qui n’a pas éprouvé, parfois, une sensation comme celle-là ?

 "En débandade, ire ou dérade" :
"ire" (du latin ira) = "forte colère".
"dérade" : (terme de marine) le fait de dérader, quitter une rade à cause du gros temps (pour un navire) ; d’où, au sens figuré, égarement, errements, détresse profonde.

 "Aliénés par toutes ces peaux lisses
Et cheveux droits comme il se doit"
 :
"aliénés" signifie à la fois "rendus fous" et "rendus autres" ("alienus" = autre, en latin, détournés d’eux-mêmes, de leur vraie nature authentique), parce que, par exemple, les Noirs se font blanchir la peau ou défriser les cheveux (pour les rendre "droits", non crépus) afin de devenir comme les Blancs, parce qu’on leur a inculqué la dévalorisation des traits et caractéristiques négroïdes.

 La périphrase "le pays des Droits de l’Homme" désigne la France.

 "Quimbois" (tjenbwa) : magie, sorcellerie créole.

 "Tiens, bois, doudou !"
"Tiens" et "bois" sont à l’impératif, référant à l’étymologie du mot "quimbois" : "Tiens, bois !" car, en magie, le sorcier te donne à boire une potion, un philtre, une mixture magique pour t’ensorceler.

 "Doudou" : ce mot créole veut, à la base, dire "chéri", "mon cher", "ma chère" ; donc on l’emploie quand on veut amadouer quelqu’un, lui faire du charme — y compris pour lui faire subir un "charme" au sens fort, un ensorcellement, en l’occurrence. Par exemple, au marché de Fort-de-France, les marchandes appellent les client(e)s "doudou" : "Doudou, fais-moi vendre !"
En France hexagonale, ce mot créole est employé pour désigner le jouet fétiche d’un enfant, sa peluche favorite, sans doute parce qu’il y a beaucoup de nounous antillaises (nurses, "da" en créole, autrefois)…

 "peau sauvée" (en créole lapo sové) : peau claire de mulâtre ou métis, " sauvée " de la malédiction d’être noire, selon le bourrage de crâne esclavagiste et colonialiste.

 "Chevelures grainées" = des cheveux crépus, qui forment comme des grains serrés.

 Mêlés nos sangs
D’échappés :
“échappés”, à double sens, correspond au créole “chapé” :
1/ “chapé” (créole) : à peau claire, qui a “échappé” à la couleur noire, sang-mêlé, métis.
2/ esclave marron, qui s’est “échappé”, être libre.

 "Banania" :
Le nom "banania" est utilisé comme une insulte à l’égard des Noirs. Banania est une marque française de chocolat en poudre (d’où le jeu de mots, plus bas, sur "marques"). Son slogan, « Y’a bon Banania », prononcé par un tirailleur sénégalais, a été critiqué comme symbole du colonialisme porteur de stéréotypes racistes à travers la caricature du Noir incapable de s’exprimer correctement. Le Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples (MRAP) a obtenu en 2011 devant la cour d’appel de Versailles que la société titulaire de la marque Banania fasse cesser la vente de produits portant le slogan "Y’a bon".

 "bamboula" :
Le mot bamboula, qui désigne à la fois une variété de tambour africain et une danse, est devenu un terme péjoratif pour désigner les personnes noires d’origine africaine.

 "Un passé de marques
Gens de marque"

" Gens de marque " signifie "des gens bien", comme on dit "des hôtes de marque", des VIP, des personnes que l’on doit respecter. Jeu de mots avec "jeans de marque" pour rétablir la dignité de personnes qui ont reçu des coups, qui en ont encore les traces, les séquelles, les "marques" : "Un passé de marques".

 "Gens de marque
Au nez et aux barbes barbares
De nazillons nasillards"
 :
ce groupe des 3 vers va ensemble : la construction réfère à "Gens de marque" (c’est une provocation, un défi que ces prétendus "sous-hommes" soient des "Gens de marque", des gens bien, comme on dit "des hôtes de marque", des VIP, face aux nazis, néonazis et autres "nazillons" qui les considèrent comme des parias, des sales immigrés, des métèques etc.), et est basée sur l’expression "faire quelque chose au nez de quelqu’un", "à la barbe de quelqu’un", qui signifie "le faire devant lui sans peur, en le bravant, oser faire quelque chose devant quelqu’un, donc "sous son nez", sans se cacher), par exemple "rire au nez de quelqu’un". C’est une expression toute faite : "il a fait ça à mon nez et à ma barbe" = sans se cacher, ostensiblement. Ces deux expressions sont liées dans la métaphore filée "nez/nasillards" et les "barbes" qui évoquent les barbus islamistes : il s’agit des extrémistes et terroristes DE TOUT POIL, barbus ou rasés comme les skinheads néonazis ou "boneheads", ou comme le Norvégien tueur, un extrémiste opposé au multiculturalisme ;
"nez et barbes barbares" est un hypallage, bien sûr, ce sont ces hommes qui sont barbares et non leur nez ou leur barbe : par licence poétique, cette figure de style attribue à un mot d’une phrase ce qui convient logiquement à un autre (comme Hugo écrivant "le marchand accoudé sur son comptoir avide" : tout le monde comprend que c’est le marchand qui est avide et non le comptoir, mais l’image est plus forte).

 "Pour s’ouvrir l’avenir se démarque"
Un avenir qui va "s’ouvrir" est ici dans le sens d’un avenir qui n’est pas bouché, un avenir qui va offrir tout le champ des possibles ; il "se démarque", car il se différencie du passé, prend ses distances par rapport au passé pour ne pas commettre les mêmes erreurs ni subir les mêmes avanies.

 "Prendre nos marques
À vos marques
Prêts
Partez "

Pour évoluer, pour progresser, il faut prendre son élan, comme au départ d’une course vers un avenir meilleur, sans faux-pas, sans retard. D’où le vocabulaire de la course à pied : "À vos marques ! Prêts ! Partez ! " Ces ordres sont lancés aux coureurs en position de départ, sur la ligne de départ (= les "marques" au sol), juste avant le signal du départ : quand retentit le 1er cri ("À vos marques !"), les coureurs se baissent, mains au sol, un pied en avant (le pied d’appel) ; au 2è cri ("Prêts !"), les coureurs lèvent les fesses ; au 3è et dernier cri ("Partez ! "), ils ont intérêt à s’élancer sans perdre une seconde ! Ah, les bons souvenirs du temps où j’étais lycéenne, et où je courais le plus vite… La métaphore est que ces peuples ont à s’élancer pour rattraper le temps perdu en siècles d’oppression, d’immobilisme forcé, de stagnation sous le joug de puissances malfaisantes, contraignantes, voire destructrices.
"Prendre nos marques" et "À vos marques" sont toutes deux du vocabulaire du sport, mais avec deux sens différents du mot "marques" : dans "prendre ses marques", "marques" = le décompte des points gagnés, des buts inscrits au cours d’une compétition, le score… "Prendre ses marques" signifie affirmer son territoire, délimiter son champ d’action, trouver ses repères ; tandis que dans "À vos marques", le mot "marques" est pris au sens de repère personnel établi par les athlètes avant d’effectuer un saut, une course (= la ligne de départ tracée au sol).

 "D’Îles au Vent" :
Les Antilles sont surnommées "Îles au Vent" (ou "Îles du Vent", en anglais Windward Islands) ou bien

 "Îles sous le Vent" (en anglais Leeward Islands) selon leur situation par rapport au vent. Les "Îles au Vent" (ou "Îles du Vent"), parmi lesquelles se situe la Martinique, font partie des Petites Antilles. (Jeu de mots entre "sous le Vent" et "soulevant".)

 "Haut nos fronts bistres :
l’expression « haut… » est invariable, comme dans « haut les cœurs » ; « bistre » signifie « olivâtre ».

 "Sans-papiers, sans dieux ni maîtres" :
Le mot « maîtres » est ici dans le sens de « propriétaires d’esclaves », de "patron".

 "sans-papiers" : un "sans-papiers" est une personne qui n’a pas de pièces d’identité en règle, un immigré en situation irrégulière, un clandestin.

 "Bavures pour babylones barbares" :
Les "bavures" sont des erreurs policières plus ou moins volontaires ; "babylone" est le surnom donné par les rastas aux policiers, gendarmes et autres forces de l’ordre qui se font parfois force du désordre, au service des modernes Babylones, métropoles de perdition à "civilisation" sophistiquée mais barbare où sévissent les puissances d’argent et les puissances du mal sans respect de la vie humaine, car dans la Bible la ville de Babylone est un lieu de perdition, de corruption et d’iniquité. Ici la préposition "pour" est dans le sens de "destiné à", "voué à être la proie de", "condamné à être victimes de" : ces malheureux ont une trop bonne tête à "bavures pour babylones barbares".

 "arc-en-morne" : fantaisie poétique à double référence, d’une part les populations "arc-en-ciel" de gens de toutes couleurs, et, d’autre part, "l’arc-en-morne" faisant allusion au conte créole qui dit qu’un trésor est caché au pied de l’arc-en-ciel planté dans le sol du morne (la colline).
"Morne" = colline arrondie des Antilles.

 "Griffe, sacatra, câpre, câpresse, signare, griffonne
Négritte, négrille, négrillonne
Octavon, congo, quarteronne, mamelouque, marabou, métif, métive…"
 :
types de personnes métissées ; voir l’abominable classification de Moreau : d’après ledit sieur Louis-Élie Moreau de Saint-Méry (Description topographique, civile et historique de la partie française de l’isle de Saint-Domingue, 1798), un ou une "sacatra", c’est le résultat de la combinaison d’un nègre et d’une "griffonne", "griffe" étant le résultat de la combinaison d’un nègre et d’une mulâtresse. (Pour rappel, une mulâtresse est le résultat de la combinaison d’un Blanc et d’une négresse, ou d’un nègre et d’une Blanche).
Louis-Elie Moreau de Saint-Méry ne dénombrait pas moins de 128 combinaisons ! En voici quelques-unes, suprême raffinement dans le racisme :
• Combinaisons du Blanc :
D’un Blanc et d’une Négresse vient un Mulâtre
…………………………… Mulâtresse / Quarteron
………………………………Quarteronnée / Métis
………………………………Métis / Mamelouck
………………………………Mamelouque / Quarteronné
………………………………Quarteronnée / Sang mêlé
………………………………Sang mêlé / Sang mêlé qui approche du blanc
………………………………Maraboue / Quarteron
………………………………Griffonne / Idem
………………………………Sacatra / Idem

• Combinaisons du Nègre :
D’un Nègre et d’une Blanche vient un Mulâtre
……………………………… Sang mêlé / Idem
……………………………… Quarteronnée / Idem
……………………………… Mamelouque / Idem
……………………………… Métisse / Idem
……………………………… Quarteronnée / Marabou
……………………………… Mulâtresse / Griffe
……………………………… Maraboue / Idem
……………………………… Griffonne / Sacatra
……………………………… Sacatra / Idem

 câpre, féminin "câpresse" : on trouve aussi la forme "cafre" pour désigner une sorte de Noir.

 "Négritte, négrille, négrillonne" sont de vieux mots synonymes de "petite négresse", "jeune négresse", péjoratifs et racistes.

 "Quarteron" désigne un individu né de l’union entre un mulâtre et un blanc, c’est-à-dire un individu ayant un grand-parent d’origine africaine — ou non européenne — sur quatre. Un quarteron serait également un individu né de l’union d’un mulâtre et d’un noir, c’est-à-dire un individu ayant un grand-parent d’origine européenne sur quatre. Le terme peut avoir une connotation péjorative, voire raciste.

 "octavon, octavonne" :Un enfant issu d’une union quarteron-blanc est un octavon.

 "Métif, métive", synonymes de "métis, métisse", sont de vieux mots du temps de l’esclavage et de la colonisation, donc des appellations racistes, méprisantes et disqualifiantes.

 "signare" : Les signares (du portugais senhoras) sont les jeunes femmes métisses issues du mariage de Portugais avec des femmes wolof et fula de la Petite-Côte du Sénégal, dans les comptoirs de Rufisque (Rufisco) au XVIIè siècle, puis de Gorée et finalement de Saint-Louis jusqu’au milieu du XIXè siècle.

 Cette énumération crée une petite chanson cruelle, comme les moqueries des enfants qui font une ronde autour d’un souffre-douleur.

 "Marron, marronne !" : tous les mots précédents sont employés avec mépris, comme des insultes ou en moquerie, mais nous pouvons nous libérer, nous émanciper, comme le "marron", l’esclave échappé de la plantation, nous pouvons nous libérer, nous émanciper, devenir des "marrons", échapper à la servitude.
Le mot "mulâtre" lui-même, — non employé dans ce poème mais sous-jacent, de même que le mot "métis", — est péjoratif et raciste, ne serait-ce que par son suffixe –âtre, dépréciatif, et par son étymologie : il vient de "mulatto", "mulet" en espagnol, produit de l’accouplement d’un âne et d’une jument, un animal méprisé, par rapport au cheval, animal noble, surnommé "la plus noble conquête de l’homme". Ironie du sort : le mulet ne peut se reproduire, tandis que les mulâtres et autres métis se sont montrés très prolifiques, autre forme de résistance, de marronnage : survivre, croître et multiplier en dépit de la forme de génocide que fut l’esclavage avec son cortège de déportations, de sévices et de supplices.

 "Blanche Neige, basanés, métèques
Des mots qui nous font des bosses"
 :
ces mots qui sont des insultes nous frappent comme des coups et nous font des bosses comme quand on s’est cogné, quand on a été battu, boxé.

 Dans la Grèce antique, le terme de « métèque » (littéralement, « celui qui vit avec ») désigne l’étranger domicilié dans une cité autre que celle dont il est originaire. Il ne comporte alors aucune connotation péjorative, au contraire de son usage contemporain en français, familier et insultant.

 “être bien debout dans nos peaux" n’a pas le même sens que le “nous sentir bien dans nos peaux » de l’avant-dernier vers. Il y a une nuance d’importance : ici, ça signifie « être fier, avoir de l’assurance, résister, ne pas se sous-estimer, ne pas se croire inférieur ».

 ’’Négresses à plateau" : moquerie insultante. L’une des particularités de la tribu africaine des MURSI est le port de plateaux labiaux par les femmes ainsi appelées ’’Négresses à plateau’’.
Voir http://artcorporel.canalblog.com/albums/les_mursi/index.html

 "Négrita" est une marque de rhum "premier prix", bas de gamme, populaire en France ; autre moquerie méprisante à l’égard des personnes noires, comme "Banania".

 "Rastaquouère" : (familier et péjoratif) : Personnage exotique qui étale un luxe suspect et de mauvais goût. Il est question ici, non seulement de toute forme de racisme, mais également de xénophobie.

 "Bougnoule – « noir » en wolof, « arabe » en argot féroce –" :
« L’histoire de l’argot raciste corrobore les thèses de Fanon. "Bougnoule" dérive d’un mot wolof qui signifie "noir" mais qui, à partir du XIXè siècle, était utilisé en français pour désigner de façon péjorative tous les peuples noirs du Sénégal et de l’Afrique de l’Ouest en général, quelle que soit leur appartenance ethnique. Ultérieurement, il fut appliqué de façon indiscriminée aux populations arabe-berbères du Maghreb"… » (David Macey, Fanon, une vie, éd. La Découverte).

 "Bique, bicot, crouille, melon […]
Raton " :
Ces mots, tous insultants, réfèrent principalement à l’Algérie "française" d’autrefois pour désigner les Arabes…

 "Beur" : (verlan) "Arabe", plus précisément les jeunes Arabes nés en France de parents immigrés. Le verlan (= l’envers, en verlan !) est une forme d’argot français qui consiste en l’inversion des syllabes d’un mot, parfois accompagnée d’« élision », un type d’apocope, ou d’ajout de voyelles. Le verlan actuel s’est répandu en français depuis la deuxième moitié du XXè siècle, surtout dans les banlieues, mais l’inversion de lettres ou de syllabes, utilisée afin de créer un effet de style en littérature, date de plusieurs siècles.

 "Keubla"= "black" en verlan (argot qui inverse les syllabes).

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