Chlorophyllienne claustration Écrire en mon île confinée, 17e jour de confinement, jeudi 2 avril 2020
Chlorophyllienne claustration
En fait je réalise que je ne suis pas sortie, si ce n’est dans mon jardin, depuis que les gendarmes m’ont fait sortir de la mer le fameux vendredi.
Ouais, un vrai confinement depuis le 20 mars, mais cet enfermement est quand même aéré, une chlorophyllienne claustration, avec mes arbres alentour, mon cher petit oranger qui donne quelques oranges pour la prisonnière que je suis, elles sont presque à maturité, je vais bientôt pouvoir en manger.
Une toute petite orange pas plus grosse qu’une balle de ping-pong est tombée, toute tristounette. Bizarre, puisqu’il n’y a pas de gros vent. Elle n’est quand même pas coronavirée ?
Le pommier d’eau vient de fleurir en splendides fleurs fuchsia, un petit cocotier s’apprête à remplacer celui qui avait été foudroyé et cet autre, qu’un cyclone avait décapité.
Le renouveau est là, « La vie est là, simple et tranquille », dixit Verlaine. « Cette paisible rumeur-là vient de la ville »… Là, vraiment hyper paisible !
Je prends du soleil sur ma terrasse, vitamine D, c’est bon pour le moral, c’est bon, bon, comme dans la chanson !
Et pour l’activité physique je danse et monte et descends l’escalier conduisant à la cuisine, du step, n’est-ce pas ? Je n’ai pas encore compté les marches, je n’en suis pas encore là, mais je sens que ça viendra.
Et de méditer l’idée que le confinement est un concept bourgeois inadapté aux banlieues surpeuplées et aux quartiers populaires, en Martinique comme dans l’Hexagone, en Inde, en Afrique, au Brésil dans les favelas…
Certes la pollution atmosphérique a diminué, par contre, en Guyane, l’orpaillage clandestin fait florès… Le jour d’après, on ne pourra pas repartir comme avant, la voix de la sagesse suggère qu’il faudra penser autrement, relocalisations etc.
Ne pas sortir pour s’en sortir !
Se divertir, mais en profiter pour réfléchir !
Puisqu’à distance ça ne craint rien, bisous tous azimuts, bizouk, be zouk : « Zouk-la sé sèl médikaman », « le zouk, c’est le seul médicament », dixit Kassav… (Faute de nage, je danse…)
Suzanne Dracius
Pointe-des-Nègres, Martinique – lieu de débarquement de mes ancêtres esclaves déportés d’Afrique pendant la traite négrière –,
17e jour de confinement, jeudi 2 avril 2020,