Mens sana in corpore sano PÉTITION Pour un accès à la mer en Martinique dès le 11 mai !

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 Pour un accès à la mer en Martinique dès le 11 mai !

MENS SANA IN CORPORE SANO

Lors du déconfinement, le 11 mai, chance, autorisation de sortir de chez soi sans attestation de déplacement dérogatoire jusqu’à 100 km de son domicile ! Mais dans une île comme ma chère petite Martinique natale qui fait à peine plus de soixante km de long dans sa plus grande longueur, la belle affaire, 100 km, c’est dans l’eau, ça tombe dans la mer ! Et c’est à l’eau pour les bains de mer, puisque les plages sont interdites au moins jusqu’au 2 juin ! Ça nous fait une belle jambe, mais pour se dégourdir les jambes, il va falloir trouver autre chose que la nage.
Nous avions pourtant réussi à l’apprivoiser dans nos mémoires, cette « mer à goût d’ancêtres » qu’évoque Césaire. Au lendemain même de l’anniversaire du décret d’Abolition de l’esclavage du 27 avril 1848, le discours centralisateur du Premier ministre prend de sinistres résonances, impérieuses, oublieuses des différences des Outre-mer dans la stratégie de déconfinement.
À 7000 km de l’hexagone, plus que jamais j’exècre ce mot « métropole » dégoulinant d’outrecuidance, dégouttant – et, partant, dégoûtant – de condescendance, si l’on se souvient de son étymologie (dans « métropole », il y a polis, la Cité, et mêtêr, la mère ; c’est bien mignon, ce côté maternel, mais quand même ça infantilise les non-métropolitains, les colonisés, ex-colonisés ou décolonisés ; on peut aussi y voir une autre étymologie, métron, la mesure, la référence, la même racine que dans « mètre », avec l’idée de mètre étalon, de modèle, ce qui est à imiter. Tout le reste n’est que de l’à peu près. La cité de référence ! La référence devant laquelle il n’y aurait qu’à s’incliner. Mais la référence à quoi ?
« Nulle terre française ne peut plus porter d’esclaves », dixit le Gouvernement provisoire de la Deuxième République, qui comptait en ses rangs le poète Lamartine ; la tentation est grande de paraphraser ou parodier l’auteur du « Lac » avec cet alexandrin :
Un seul virus vous hante et tout est dépeuplé,
y compris les plages que nous avions réussi à reconquérir dans nos corps, dans nos mémoires et dans nos cœurs, à ne plus voir seulement comme les lieux de débarquement de nos ancêtres esclaves déportés d’Afrique mais comme des lieux de divertissement au sens fort, au sens pascalien du terme, pour nous détourner de l’horreur du gigantesque traumatisme, lieux de bains « démarrés » symboles de marronnage, lieux ouverts à l’air libre permettant d’échapper à la privation de liberté. Cette interdiction liberticide nous rappelle cruellement à quel point nous sommes dépendants d’un pouvoir dont la tête est à 7000 km, sur l’autre bord de l’océan, là-bas en Europe, une Europe qui n’a su faire aucune union sanitaire comme elle fit l’union monétaire, qui parle peu ou prou de guerre en une pathétique cacophonie au sommet et qui monte, désunie, démunie, à l’assaut de ce satané coronavirus, inéquitablement équipée, iniquement dépourvue de masques, de tests, de lits de réanimation, de respirateurs...
Si les chercheurs n’étaient pas condamnés à perdre quasiment plus de temps à chercher de l’argent pour financer leurs recherches qu’à les effectuer, ils auraient peut-être déjà trouvé la panacée, l’incontestable remède miracle pour guérir du Covid-19 et le vaccin pour s’en prémunir.
De cette lointaine Europe me parviennent jusqu’en Martinique – vive la moderne technologie qui réduit l’espace et se joue du temps – des photos de mes petits-neveux allemands, petits-enfants de ma sœur Micheline, médecin virologiste en Allemagne, mariée à un professeur de français. Dans cette mascarade cauchemardesque, ces mignons bambins masqués apportent une petite note insouciante, une lueur gaie au bout de ce tunnel dont on ne voit pas la fin. Eux, ils trouvent ça rigolo, de mettre leurs masques aux couleurs vives. Ça réconforte, dans cette atmosphère mortifère, ça console un peu de ne pouvoir aller en toute sérénité prendre un bain de mer.
Si l’on nous avait écoutés, plus tôt, plus vite, pour endiguer la propagation du virus dans nos îles...
Où est la logique dans tout cela ? À partir du 11 mai, faisant fi des recommandations de l’Académie de médecine, qui préconisait un retour à l’école en septembre, le gouvernement a décidé que les enfants pourraient aller s’enfermer dans une salle de classe en espace confiné où peuvent proliférer les virus, mettant en danger de mort eux-mêmes et les enseignants – qui pourraient bien exercer leur droit de retrait –, mais ils devraient patienter jusqu’au 2 juin pour pouvoir aller à la plage, c’est-à-dire faire de la natation, l’un des exercices physiques les plus sains qui soient, apte à combler l’idéal mens sana in corpore sano, un esprit sain dans un corps sain, se baigner dans la mer, l’un des seuls sports gratuits, l’un des plus ludiques, en plein air, à la portée de tous, a fortiori dans une île !
Il ne faudrait pas nous infantiliser et nous croire moins capables de respecter sagement les mesures de distanciation dans les espaces ouverts des plages que dans les huis clos des salles de classe !
C’est « sur la base du volontariat » que s’amorce la réouverture des écoles… Pourquoi ne pas tolérer le « volontariat » de personnes sensées, censées veiller au bien-être de tout un chacun, en permettant l’accès aux plages dans le respect des mesures sanitaires ?
Merci de prendre en considération les spécificités des Outre-mer !
Plages interdites jusqu’au 2 juin aux Antilles ?! Il faudrait une dérogation pour nos îles ! Et tenir compte de la différence entre les plages surpeuplées de l’hexagone et les nôtres, où l’on peut sans peine respecter une distanciation, en évitant de rester des heures agglutinés à lézarder collé serré en groupes compacts !
Nager dans la mer ou se promener dans la nature n’a vraisemblablement aucune incidence sur la circulation du coronavirus. En revanche, de nombreuses études démontrent l’effet bénéfique du contact avec la nature et de l’activité physique sur la santé, y compris la santé mentale et psychique.
Suzanne Dracius

Ibidem, c’est-à-dire au même endroit, forcément, en marronnage immobile à grands pas,
44e jour de confinement, mercredi 29 avril 2020

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