À la recherche du jardin de Suzanne Césaire : Article de Suzanne Dracius in Research in African Literatures

In Search of Suzanne Césaire’s garden
samedi 3 septembre 2011
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« In Search of Suzanne Césaire’s Garden », article de Suzanne Dracius in Research in African Literatures, vol. 41, N° 1 (Spring 2010), Indiana University Press, The Ohio State University (pp. 155-165).

« Le grand camouflage », publié en 1945 par Suzanne Césaire, est l’essai qui clôt le tout dernier numéro de la revue Tropiques, qu’elle a co-fondée avec son mari Aimé Césaire et René Ménil. Elle n’a par ailleurs pas été publiée, même pas à Présence africaine… Je le déplore dans mon article intitulé « À la recherche du jardin de Suzanne Césaire », qui a été publié traduit en anglais, mais écrit en français, bien sûr : il s’agit d’une commande, un article qui m’avait été demandé pour la revue Research in African Literatures, Vol. 41, n° 1 (Spring 2010).
On m’avait demandé d’écrire un texte pour ce numéro spécial Césaire, Aimé Césaire, et j’avais accepté, mais à condition de pouvoir écrire sur l’aimée d’Aimé, Suzanne.
(Il y a quelques années, invitée à faire une conférence à l’Université de Porto-Rico, j’y avais rencontré une universitaire qui m’avait bien amusée en s’écriant « Ah, c’est vous qui hantez mon ordinateur ! ». En fait elle travaillait sur Suzanne Césaire, et s’était exclamée, en me voyant, qu’elle était bien contente de voir en chair et en os l’autre Suzanne, la Dracius, sur laquelle elle tombait chaque fois qu’elle cherchait sur Internet « Suzanne »…
Mais il n’y a pas de coïncidences, il n’y a que des correspondances, baudelairiennes, en synesthésie, comme je l’ai écrit dans Rue Monte au ciel, ouvrage en hommage à la féminitude, en élévation, toujours, ascensionnelle et sensationnelle, à l’instar de Simone de Beauvoir, qui usa de ce néologisme, « féminitude », et de Suzanne Césaire, qui ne l’aurait sûrement pas renié.)

Extrait de la présentation de Research in African Literatures :

"Finally, Suzanne Dracius’ combined meditation and memoir, “In Search of Suzanne Césaire’s Garden,” uses as a point of departure an interview/audience with the poet to pay homage to the lost voice of Suzanne Césaire and to contest the occultation of Antillean women’s writing more generally."

Traduction de l’extrait de la présentation de Research in African Literatures :

"Enfin, la méditation combinée à la mémoire de Suzanne Dracius, « À la recherche du jardin de Suzanne Césaire », utilise comme point de départ un entretien avec le poète pour rendre hommage à la voix perdue de Suzanne Césaire et pour déplorer l’occultation des écrits des femmes antillaises plus généralement."

Le texte original :

À la recherche du jardin de Suzanne Césaire

« Suzanne, ma femme ! » s’écrie le joueur de sèbi lorsqu’il a fait un six. « Sizan , ma femme ! ». J’ai entendu cela toute ma vie, depuis ma plus tendre enfance, dans notre martiniquaise diglossie, jusqu’à un beau matin où ces mots-là revêtirent une tout autre importance. « Suzanne, ma femme ! » C’est ainsi qu’Aimé Césaire s’exclama en souriant, le jour où son ami de toujours, le cordial Cordo, alias Félix Cordémy, me présenta au grand homme. Immédiatement Césaire me dit que non seulement mon prénom, mais ma personne même et mon tempérament littéraire évoquaient pour lui cette autre Suzanne, sa femme.
Aujourd’hui Aimé Césaire a rejoint, comme Suzanne, le Royaume des Ombres, pour d’improbables prosopopées avec son ami Senghor dans ces Champs élyséens que nous évoquâmes ensemble, en complices « nègres gréco-latins » férus de Lettres Classiques, lors de l’entretien que Césaire m’accorda pour l’anthologie Prosopopées urbaines, car, pour lui, la Ville c’était Paris, la découverte de Paris, tout jeune encore ; la Ville avec un grand V c’était forcément Paris, car c’est le lieu de sa rencontre avec Senghor.
À quelques mois d’intervalle, j’ai perdu mes deux pères : mon « vrai » père, Osman Dracius, et mon père poétique, Césaire.
Mais ces ombres, je les veux tutélaires, sans en prendre ombrage, à l’instar des impatiences tapies dans l’ombre des pieds de bois à l’orée de la forêt tropicale humide. Toutefois je me veux verticale comme le nègre césairien « debout les cheveux dans le vent », femme debout comme les fougères arborescentes de la cascade d’Absalon, sur les hauteurs de Balata, traquant sa trace sur la Trace, la route où venaient chercher la fraîcheur Césaire et Suzanne, sa femme, y puisant la source d’une « chlorophyllienne création » ascensionnelle, sensationnelle, telle que je l’idéalise dans Rue Monte au ciel . N’observèrent-ils pas, lors de ces promenades, que l’Antillais est un « homme-plante » ? Il est vrai que le Martiniquais est capable de vous parler de « la germination de la mort », d’évoquer et d’invoquer Mère Nature non seulement par rapport à la vie, mais aussi en féconde et fertile relation avec la mort.
Féminine toujours, féministe parfois, et cela ne le heurtait pas, m’adonnant au double marronnage — en tant que Martiniquaise qui écrit et en tant que femme qui écrit —, je mis en pratique la césairienne exhortation « Marronner, il faut marronner ! » qu’écrivit naguère Césaire à René Depestre pour l’encourager à ne pas se laisser entraver par les aragoniennes contraintes d’une métrique stricte . Vis-à-vis du chantre de la Négritude, qui, depuis mon premier roman, L’autre qui danse , me faisait l’honneur d’apprécier mon écriture , je me permis une impertinence non dénuée d’une certaine pertinence : à propos de cette autre Suzanne — l’aimée de Césaire —, je fis le reproche au grand poète de n’avoir jamais fait éditer ce que sa femme avait écrit, ne serait-ce qu’à Présence Africaine, maison d’édition où il avait plus que ses entrées, puisqu’il en était quasiment le co-fondateur. Il existe en effet – ou plutôt il a existé – une pièce de Suzanne Césaire dont on n’a plus que le titre : Youma, aurore de la liberté. Le grand homme ne s’en souvenait guère. Je lui posai franchement la question : où est passé le texte de cette pièce ? Pourquoi n’est-il pas publié ? D’une toute petite voix, le grand homme me répondit qu’à l’époque, c’était difficile, pour une femme, d’être éditée. J’eus beau lui parler de Beauvoir, qui y était parvenue, exactement à la même époque, dans cette France du début du XXème siècle, avec l’aide et le soutien de Sartre, certes, plus difficilement et plus tardivement que Sartre, peut-être, mais quand même, et avec succès… De toute évidence, ce qui valut pour Simone ne valait pas pour Suzanne.
Tous les couples ne sont pas similaires, tous les couples n’ont pas les mêmes pactes. Tous les couples ne sont pas à l’abri des « contingences ».
Toutes les femmes sont du « deuxième sexe », mais toutes n’écrivent pas Le Deuxième Sexe. Qui plus est, les difficultés, pour une Martiniquaise, une femme « de couleur », une « fille des isles », étaient sans doute accrues. La pièce fut jouée au début des années 1950, mais jamais publiée, et le texte en est perdu, mystérieusement.
Lorsque j’évoque cette pièce, son titre, Youma, aurore de la liberté, Césaire remue péniblement de sourcilleux souvenirs. Lui, il évoque curieusement, non pas Suzanne Césaire, comme on s’y serait attendu et comme je le désirais, mais Lafcadio Hearn, la pièce de Suzanne, sa femme, étant une adaptation théâtrale du roman de ce dernier intitulé Youma (1890), histoire d’une « da » dans les derniers temps de l’esclavage, esclave noire qui se dévoue au péril de sa vie pour sauver d’un incendie la petite fille blanche dont elle est la nourrice, lors de la révolte d’esclaves de 1848. Domestique chargée des petits enfants, « la da était aimée et respectée comme une mère : elle était à la fois la mère adoptive et la bonne d’enfant. Car l’enfant créole avait deux mères : l’aristocratique maman blanche qui lui donnait le jour, et la sombre mère esclave qui lui donnait tous ses soins », peut-on lire dans Youma. La conversation roule sur la Youma de Lafcadio Hearn, perdant de vue Youma, aurore de la liberté, la pièce de Suzanne Césaire dont je demande des nouvelles car elle m’intrigue. Comment Suzanne a-t-elle renouvelé ce thème du rapport maître/esclave, et, en l’occurrence, de la relation particulière unissant la nourrice noire à l’enfant blanche ? Quels apports nouveaux a-t-elle faits ? À en croire son titre, la pièce de Suzanne Césaire ajoutant « aurore de la liberté » au simple titre éponyme promet d’insister davantage sur l’émancipation commençante des esclaves que sur le dévouement servile de la « da » sauvant du feu une petite béké. Voilà ce que je brûle de savoir. Césaire ne se souvient pas. Il ne rit plus, fronce les sourcils. Césaire n’entend plus très bien. Il faut hurler pour qu’il comprenne, se pencher tout près de son oreille. Il m’assure ne pas se souvenir. Il a hâte qu’on passe à autre chose. Pas forcément à quelqu’un d’autre, mais à autre chose. Il veut bien qu’on parle de Suzanne, sa femme, mais pas de Suzanne écrivain. Pas de cette Suzanne écrivain-là. Pas de cette pièce disparue ni de son contenu ni de son message. Soucieux mais de nouveau souriant, toujours aimable, Aimé Césaire se montre fort surpris que j’en aie connaissance, s’en enquiert de façon mondaine et pas du tout littéraire, du bout des lèvres, comme on prend des nouvelles d’un ami commun qu’on n’a pas vu depuis longtemps auprès d’une personne rencontrée par hasard dans la rue. Je le sens désormais distant. Je vois qu’il s’est distancié. J’ai même l’impression qu’il se fiche de ma réponse, quelle qu’elle soit.
Césaire m’avait dit apprécier mon fabulodrame Lumina Sophie dite Surprise . Stoïque, j’en profite pour lui expliquer quand même que c’est José Alpha, lors de la mise en scène de ma pièce Lumina en l’an 2000 à la Préfecture lors de la Marche Mondiale pour la Femme, qui m’a fait ce triste conte véridique : il n’y a pas si longtemps, il existait en Martinique un des interprètes de la mythique pièce de Suzanne Césaire qui pouvait encore réciter quelques bribes du rôle qu’il avait joué dans ses jeunes années, en comédien amateur, plus d’un demi-siècle auparavant. Mais ce vénérable vieillard, Émile Capgras, ex-président du Conseil régional de Martinique — car il s’est, par la suite, consacré à une autre forme de comédie, celle de la politique —, était bien incapable d’en livrer in extenso le contenu. (Il ne se rappelle que son rôle, et encore ! J’ai vu des comédiens très sérieux qui connaissent en entier l’ensemble de la pièce qu’ils répètent, pas seulement leurs propres tirades, par exemple la talentueuse Maddy-Nina Pamphile, qui connaît Lumina par coeur, mais hélas, là, ce n’est pas le cas.) Ainsi ce texte est-il perdu. Perdu à jamais, peut-être. Puisse-t-il ne pas en être de même pour d’autres écrits de femmes ! Je poussai Césaire à faire avec moi ce voeu pieux, afin de conjurer ce genre de malédiction. C’est ce genre d’occultation — plus ou moins volontaire, plus ou moins phallocrate ou machiste, voire délibérément misogyne — des écrits féminins antillais que contribuent à pallier mes livres, à la grande satisfaction du grand homme. C’est du moins ce qu’affirme le « nègre fondamental » en manipulant mes livres qu’il annote et tripote et qui trônent ou traînent sur son bureau , si bien que l’unique reproche que j’aie eu la pertinente insolence de faire à Aimé Césaire s’efface devant l’immense encouragement que le « grand poète noir » salué par Breton a su me prodiguer, en écrivant cette dédicace à ma mère : « À Elmire Dracius, que la Martinique remercie, entre autres choses, d’avoir mis au jour la Poésie, la vraie : Suzanne. » Signé : Aimé Césaire. Quel plus prodigieux compliment aurais-je pu imaginer ?
Nous avions changé de sujet : un de nous deux au moins aura été immédiatement exaucé.
Et la Suzanne d’aujourd’hui de déplorer, solitaire, que pour la Suzanne d’antan ne fût pas aboli « l’infini servage de la femme » – nécessitant double marronnage – dont parla Rimbaud , puis dont la délivra en visionnaire Aragon, qui affirma « L’avenir de l’homme, c’est la femme » , Aragon, ce même poète loin duquel Césaire conseilla naguère de « marronner » afin d’échapper au carcan de la versification classique. Double marronnage, disais-je, oui : le premier, en tant qu’être humain descendant d’un peuple auquel les lois de l’esclavage interdisaient l’écriture, le second, en tant que soumise à la condition féminine.
Il me restait à rêver, en kalazaza latino-créole, de kala kagatha, de choses belles et bonnes créées naguère par une féminine poésie au féminin pluriel liée à ce neutre pluriel où la misogynie n’aurait pas sa place. Il me restait à imaginer, à tenter de recréer ces kala kagatha perdues, dans Youma, aurore de la liberté et alibi, au sens propre : ailleurs. Acte poétique, s’il en est, poésie étant création, du verbe grec poiein signifiant créer.
Revêtue de ma « gaule de partir » (ainsi que j’appelais, enfant, la pimpante robe de sortie que l’on n’avait le droit de mettre que dans les grandes occasions, et celle-là en était une), je m’élançai à la recherche du jardin de Suzanne Césaire, avide de toutes les merveilles que l’on peut trouver en partant « à la recherche du jardin de [sa] grand-mère », comme le préconise Alice Walker. De bouleversantes leçons de « jardinage » nous y aident à « cultiver notre jardin », comme disait Voltaire, telles que : « La plus troublante réalité est nôtre. »
En mars 2009, près d’un an après la mort d’Aimé Césaire, à Porto Rico où j’étais invitée à faire une conférence, une universitaire présentant une étude sur les soeurs Nardal et Suzanne Césaire m’a dit en riant « Ah ! Je suis bien contente de vous voir en chair et en os, vous qui hantez mon ordinateur » : chaque fois qu’elle cherchait sur Internet des éléments sur Suzanne Césaire, elle voyait une série d’apparitions de Suzanne Dracius. Les choses ont bougé, ces derniers mois : hommage, le 7 mai 2009 au Musée Dapper à Paris, à Suzanne Césaire révélée au grand public par Le Grand Camouflage , çà et là diverses rééditions, enfin ! de ses textes (mais pas sa pièce introuvable), lectures publiques diverses etc… Bizarre qu’il ait fallu attendre la mort d’Aimé Césaire pour voir fleurir une série d’hommages à Suzanne Césaire, née Roussi. Nous sommes un curieux peuple, une curieuse humanité avec un étrange rapport à la femme.
Tout récemment, dans la roseraie de L’Haÿ-les-Roses, je suis repartie, bâton levé, mèche allumée, à la recherche du jardin de Suzanne Césaire. En effet, lors de ma récente participation, dans le cadre du Salon du livre de L’Haÿ-les-Roses, à une conférence sur les Antilles d’aujourd’hui et « la force de regarder demain » prônée par Césaire, j’ai eu la tristesse de constater que, chez les L’Haÿssiens tout roses et les L’Haÿssiennes toutes roses (pas les Haïtiens : les habitants de L’Haÿ-les-Roses !), notre « nègre fondamental » était méconnu, et son épouse Suzanne, inconnue au bataillon. Certes, le 23 septembre 2009, « l’image du jour » du site satirique martiniquais Bondamanjak présentait laconiquement, photo à l’appui montrant le N°1 de Tropiques d’avril 1941 : « Cet exemplaire du premier numéro de la revue Tropiques a été récupéré en Martinique dans une poubelle... » Mais, qui plus est, en France, même l’actualité des DOM était passée aux oubliettes, maintenant qu’elle n’était plus effervescente et qu’il n’y avait plus de morts chez nous dans des « échauffourées ».
Dans ce débat sur « la force de regarder demain », force nous était de constater que, quand il n’y avait plus de violences « visibles » chez nous au journal télévisé, nous subissions ces autres formes de violences que sont l’indifférence, la méconnaissance et l’incompréhension. Non seulement Césaire — Aimé et Suzanne et leur combat militant dès l’époque de Tropiques pendant l’Occupation, « an tan Robè » — étaient ignorés, mais a fortiori l’histoire des Antilles et l’ampleur des problèmes qu’ont à affronter de nos jours les DOM, alias « les quatre vieilles colonies » devenues départements en 1946 par l’action, notamment, du député Aimé Césaire. Force m’était de faire passer un message : « la force de regarder demain », pour l’avoir, il faut ouvrir aussi un oeil sur le passé, les passés dans tout leur tumulte. Qui peut se targuer de bien conduire sans rétroviseurs ?
Après avoir glosé sur l’expression de Césaire, « la force de regarder demain », force me fut de préciser, au cours du débat avec le public, à l’issue de la table ronde, des éléments aussi élémentaires que l’indemnisation importante accordée aux békés par l’État français après l’Abolition de l’esclavage en 1848 pour les dédommager de la perte de leur main-d’oeuvre servile, donc gratuite : des millions grâce auxquels fut fondé le Crédit Martiniquais, banque locale qui n’existe plus actuellement, n’ayant pas survécu à diverses malversations, prêts et placements hasardeux favorisant, à ce qu’il paraît, la même ethnocaste. Des millions pour indemniser les anciens maîtres dépossédés de leurs esclaves, leur « marchandise », leur mancipium émancipé désormais, comme s’il s’agissait de marchandises perdues lors d’un sinistre, pour lequel une assurance les indemniserait. À seule fin de justifier combien est difficile à trouver « la force de regarder demain » de Césaire dans la conjoncture actuelle, force fut d’expliquer que, tout compte fait, cette manne venait à point nommé pour remplir les caisses des colons appauvris par la révolution industrielle et l’irruption sur le marché du sucre de betterave produit industriellement en Europe, au point de concurrencer dangereusement le sucre de canne, autrefois or roux des Antilles.
Pour qu’on puisse mesurer combien Haïti a du mal à trouver « la force de regarder demain », force fut de rappeler aussi que l’ex-Saint-Domingue, ex-colonie française, a payé, jusqu’à il n’y a pas si longtemps, des millions d’indemnisation à l’État français pour le dédommager de la perte de sa florissante colonie et des esclaves qu’elle portait avant de devenir en 1804, dans un bain de sang, la première République noire, cette « poignée de nègres esclaves » ayant triomphalement mis en déroute l’armée la plus puissante d’Europe — donc du monde d’alors —, à savoir les troupes napoléoniennes. Tout cela, bon nombre de Français de France ne le savent pas ou ne veulent pas le savoir. Nous avons encore du (fruit à) pain sur la planche ! Mis à part quelques lettrés, les Français de France savent tout au plus qu’Haïti est l’un des pays les plus pauvres du monde et nous le serinent à tout bout de champ pour agiter le spectre de la misère noire face à toute velléité d’indépendance dans les DOM. Les Français de France savent brandir l’épouvantail des « tontons macoutes », des tueries, des exactions et des fraudes, mais la plupart ignorent que cette même Haïti a mis un point d’honneur à se saigner aux quatre veines pour dédommager la France. Bien sûr, il est périlleux de faire de la politique-fiction et d’imaginer ce que serait Haïti si elle n’avait pas payé ce lourd tribut à la France. Mais il est évident que le pays serait moins pauvre, même s’il n’est pas certain que les richesses seraient bien distribuées et équitablement réparties dans la population haïtienne.
Force fut d’évoquer la surprise provoquée par le chef de l’État, tardivement venu en rapide visite aux Antilles à la fin des grandes grèves, quand il annonça un projet de référendum en Martinique sur l’autonomie — en Martinique seulement ? —, l’autonomie chère à Césaire mais différée par un moratoire signé naguère avec cet autre président de la République, François Mitterrand, à l’arrivée de la gauche au pouvoir en France en 1981. Les collectifs de Martinique et de Guadeloupe n’avaient jamais mis en avant la question de l’autonomie… Elle n’apparaissait pas comme étant la panacée universelle pour résoudre dans l’immédiat les problèmes des DOM. Et un non L’Haÿssien non rose de dénoncer la peur qu’ont les Antillais de l’autonomie… L’autre promesse du président ne suscita pas moins de remous : l’après-midi même avaient été rendus publics les comptes-rendus des États généraux de l’Outre-mer. Or l’ensemble des avis, suggestions et propositions émis dans les ateliers pour se donner « la force de regarder demain » n’étaient pas inclus dans cette synthèse… Des plaintes avaient même été déposées…
S’élève alors dans le public, sous les poutres de la Salle du Patrimoine de L’Haÿ-les-Roses, la voix d’un L’Haÿssien rose en costume-cravate qui, nonchalamment accoudé à la fenêtre donnant sur la roseraie, demande si nous avons un « leader » capable de nous sortir du domien marasme. Et le L’Haÿssien rose tout excité d’ajouter, le feu aux joues, sur un ton de maquignon doublé d’un bookmaker : « Si vous en avez un, je suis prêt à miser dessus ! »
« Il est mort en 2008 !… Et puis nous avons eu Fanon… » susurre timidement un jeune L’Haÿssien pas rose, rouge même, puisqu’il s’est déclaré tout de go communiste lors de sa prise de parole. Face au L’Haÿssien morose désormais faute d’homme providentiel pour les DOM, celui qui proteste ainsi est un jeune conseiller municipal. Sa mère, une L’Haÿssienne toute rose, est venue me le présenter crânement comme son fils, les joues rosies de fierté. Le jeune conseiller métis a dans le teint et la taille un petit je ne sais quoi d’Obama mais ni le charisme de Barack ni les talents d’orateur de Barack Hussein Obama. C’est en un murmure hésitant, à peine audible de la salle (que je ne perçois que parce que je suis assise à côté de lui à la tribune), que ce L’Haÿssien semi-rose a évoqué Césaire… Du coup, le débat glisse vers autre chose… Enfin, pas tout à fait. Au L’Haÿssien africain qui, ayant vécu dix ans en Guadeloupe, affirme qu’il a « adoré » mais demande, sur un ton de reproche, pourquoi tous ces clivages de couleur dont il a souffert là-bas du fait de sa peau foncée, force est de rappeler que l’une des principales stratégies des colons était « diviser pour régner », ainsi qu’en attestent les abjectes classifications de Moreau de Saint-Méry divisant les esclaves en « sacatras », « griffes », « mamelouks » et autres noms d’oiseaux, ou le discours du sieur Lynch, riche colon esclavagiste des Caraïbes, prodiguant en 1712 des conseils à ses amis planteurs du Sud des États-Unis, notamment : « J’ai souligné un certain nombre de différences parmi les esclaves. J’utilise ces différences et les rend plus importantes. J’utilise la peur, la méfiance et l’envie pour mieux les contrôler. » Car l’union fait la force. Le Liyannaj donne la force. Quid, dans tout cela, de l’avènement du postracial ?
Et jusqu’aux dénominations qui posent désormais problème. Plus moyen d’appeler un chat un chat et un Blanc un Blanc. Et il n’y a pas d’alternative, pas de produit de remplacement. Le mot « blanc » est devenu tabou, « gaulois » perçu comme une insulte communautariste. Quant au terme de « leucoderme », même utilisé ironiquement avec toute la distanciation du monde, il ne passe pas. Les mêmes qui laissèrent tranquillement les Noirs se faire désigner par le terme « mélanodermes » ne supportent pas cette terminologie pseudo-scientifique, même si on leur explique que l’une n’est pas pire que l’autre, étant formées du grec mélas, noir (d’où vient aussi le doux prénom Mélanie : rien d’agressif là-dedans), ou de leukos, blanc, et de derma, la peau.
De « nègre » on est passé à « noir » sans encombres, puis revenu fièrement à « nègre » dans l’émoi dans la Négritude. De nos jours jeunes et moins jeunes se réapproprient le mot « nègre » affranchi de la connotation péjorative qu’il avait au temps de Montesquieu et de sa belle antiphrase « De l’esclavage des nègres ». Mais « nègre » est repris surtout en tant qu’adjectif (par exemple « le cri nègre ») plutôt qu’en tant que substantif, ce dernier étant quasiment réservé à Césaire, « le nègre fondamental », dans ce cas non seulement exonéré de tout sens dépréciatif, mais rehaussé du panache valorisant du césairien néologisme « Négritude », volontiers écrit avec un N majuscule. Exaucé et exhaussé, le nègre ! Car qui associe « nègre » à l’idée de Négritude n’a plus en vue l’avilissement de l’esclavage mais la grandeur vertigineuse du concept, sa portée universelle. Du moins peut-on l’espérer.
Chez les Français de France, « nègre » a du mal à passer. On y a si longtemps traité de nègres de pauvres hères enchaînés qui ne voyaient de la France que la cale de ses négriers, on y a si longtemps accolé au mot « nègre » l’épithète « sale », dans l’insulte : « Sale nègre ! » Il reste tant de mascarons aux frontons des maisons de Bordeaux représentant des caricatures de têtes de nègres lippus et crépus que l’on a mauvaise conscience.
L’emploi de tel ou tel mot n’a jamais rien d’innocent. Réunis en conférence pour trouver la « force » césairienne de « regarder demain », c’est à peine si nous avions la force de nous regarder. Entre Français de France et Français « ultramarins », toute tentative d’appellation posait problème. Nous nous parlions, mais hésitions à nous nommer. « Noir », déjà, c’était limite. Mais pour créer un euphémisme qui puisse pallier l’arrogance immémoriale du mot « Blanc » — le seul avec majuscule, en orthographe officielle : « un Blanc, un noir », peut-on encore lire dans les dictionnaires… De quoi donner envie de siéger à l’Académie française pour pouvoir corriger cette aberration raciste !
Aux Antilles, les « Blancs de France » ne répugnent pas à se laisser appeler « métros », sans savoir tout ce qu’il y a d’arrogant, de méprisant, d’écrasant dans le terme de « métropole » sur lequel est formée cette appellation en apparence anodine, abréviation de « métropolitain » — ou ne voulant pas le savoir. Or nul n’est censé ignorer que « métropole » vient du grec polis, la ville, et de métros (d’où le mot « mètre »), signifiant la mesure, la référence, le modèle. « Métropole » signifie la cité de référence par excellence, par opposition à tout le reste, qui n’a qu’à s’aligner. La « métropole » est la cité maîtresse affirmant sa supériorité, la domination du maître et du mètre.
Oh oui, à quand l’avènement du postracial, en humaniste corollaire actualisé de la Négritude ?
Là où le problème de couleur est le pire, c’est lorsqu’il devient tabou. Insidieux et pernicieux, il s’insinue en tous domaines. Des conseilleurs municipaux métis en veux-tu en voilà dans les banlieues à municipalité de gauche, oui, mais combien de maires noirs ou métis dans la douce France ? Il ne s’agit plus de pleurer sur la fanonienne lactification ni sur le lait renversé, mais de lutter pour faire notre beurre au sens noble. On a fait tout un fromage, il y a quelques années, parce qu’un village de Bretagne avait élu à la mairie Kofi Yamgnane, jovial franco-togolais avec qui j’ai fait de sympathiques photos au Salon du livre insulaire d’Ouessant. Mais ce Noir maire est l’exception qui confirme la règle. Je dis bien « ce Noir maire » et non « ce maire noir », car c’est cela qui pose problème, c’est cela qui est difficile : pour un Noir, être élu maire. Faire éclater le plafond de verre. Une fois que Monsieur le Maire est noir, ça passe : les gens sont si conformistes, si respectueux des élus ; les gens se disent si peu racistes. Une fois que le Noir est installé dans son fauteuil d’édile, bien à l’aise dans son costume à écharpe tricolore et les ors de la République, tout le monde s’incline, avec parfois un sourire narquois. On est si attaché aux règles démocratiques !
Mais percer le suprême plafond de verre, ça, jamais. On n’est pas près de voir un Antillais président de la République française. La France se veut si attachée à ses vieux principes qu’elle n’arrive pas à mettre en place un système qui, équivalant à l’ « affirmative action », porterait les mêmes fruits et porterait au pouvoir un Obama français. Les Français se disent choqués qu’on puisse faire, en France, un recensement des personnes originaires d’Outre-mer. Même cela crée polémique. En somme on nous condamne au communautarisme tout en nous accusant de communautarisme, dès que nous essayons de nous réunir en associations ou de créer une radio. Voire une TV ! Où que vous soyez, dans le plus petit village de France et de Navarre, vous pouvez voir des productions de FR3 Picardie, de FR3 Normandie etc., téléfilms, actualités ou reportages. Mais un film antillais, tous les trente-six du mois. Un reportage réunionnais ou guyanais ? En cas de chikungunya pour rigoler sur la « maladie de l’homme courbé » ou fantasmer sur les orpailleurs, parce que l’or fascine… (Et encore, un documentaire fait par des « métros » envoyés spéciaux, alors qu’il y a suffisamment de journalistes « locaux » compétents.) Mais, dans l’Hexagone, pour recevoir France Ô, pourtant tourné aux portes de Paris, il faut avoir le câble ou le satellite, donc payer un abonnement que ne peuvent s’offrir toutes les petites gens des quatre coins de France. Tout le monde capte les chaînes hertziennes, toute la France, du Nord au Sud, peut se gaver de productions de FR3 Alsace ou de FR3 Bretagne, mais si on veut suivre les États généraux de l’Outre-mer, il faut payer un supplément. Pourtant nous payons les mêmes impôts, les mêmes taxes. Il n’y a pas de réduction prévue, sur la redevance audiovisuelle, pour les Domiens résidant dans l’Hexagone frustrés de télé « domienne » gratuite accessible à tout un chacun. Qu’un quidam puisse, en zappant, tomber par hasard sur un programme « ultramarin », voilà qui est impossible. Voilà ce qui serait l’idéal. Or il faut une démarche consciente et payante pour voir de l’ « ultramarin » à la télé en France.
Ce serait d’ailleurs anticonstitutionnel de les compter, les Domiens de France : l’adjectif le plus long de la langue française, rien que ça ! Excusez-nous du peu. Ainsi on nous condamne à être à part. Français à part entière, mais entièrement à part, toujours. Nous n’avons pas accès aux médias nationaux : normal que nous tenions à nos médias antillais ! Or les mêmes qui nous taxent de communautarisme nous acculent au communautarisme. Pour ma part, je suis passée une fois, une seule, sur TF1, la grande chaîne nationale, invitée par le présentateur vedette, à l’époque, le n°1, l’homme le plus populaire de France, PPDA alias Patrick Poivre d’Arvor. C’était en 1989, pour la sortie de mon premier roman, L’autre qui danse, qui avait eu l’heur de lui plaire. Mais que je n’aille pas me plaindre : Dracius, une fois, Césaire, jamais. Et PPDA m’avait interviewée longtemps : vingt minutes ! Montre en main, mon attachée de presse n’en revenait pas. Césaire, jamais, de son vivant. Pas Césaire étant et parlant sur le plateau d’une grande télé française.
Oh, après sa mort les nécros ont abondé, avec quelques malheureuses images de RFO Télé-Martinique aux infos des chaînes nationales, et Césaire a même eu des obsèques nationales, mais en Martinique. À Paris, aucune cérémonie d’envergure nationale diffusée sur les chaînes hertziennes. Par contre, la polémique enfla à propos du transfert de Césaire au Panthéon. Césaire est mort « au pays natal », il a été inhumé dans sa terre natale, quoi de plus naturel ? Il était prématuré de réclamer le Panthéon pour Césaire, quand on sait que Dumas vient à peine d’y être transféré, en 2002, deux cents ans après sa naissance ! « Aux grands hommes la Patrie reconnaissante » tarde à prouver sa gratitude. Elle prend son temps, la mère Patrie, l’amère Patrie pour certains. Il a fallu que Césaire meure pour que les télés nationales fassent cas de lui, et encore, brièvement, du bout des lèvres, et pas longtemps : en deux-trois jours, on n’en parlait plus. Césaire retombait dans le national oubli.
À présent, si Césaire revient discrètement dans l’actualité, c’est plutôt dans les ragots et rumeurs du monde de l’édition : à ce même Salon de L’Haÿ, pas rose le potin rapporté par un ami écrivain africain. Les ayants-droits de Césaire réclameraient à Madame Diop, la patronne de Présence Africaine, les droits d’auteur du Cahier d’un retour au pays natal que Césaire avait toujours, paraît-il, refusé de toucher. Césaire aurait dit à son ami Alioune Diop, fondateur de Présence, que cet argent servirait à publier de jeunes auteurs. Dit, pas écrit. Là est le problème. Aucune lettre de renonciation à ses droits d’auteur n’atteste de l’authenticité de cette césairienne générosité. En tout cas, si Césaire alimente de nos jours les conversations dans le monde littéraire parisien, ce n’est ni pour une question littéraire, ni pour une question poétique, ni pour une question politique, mais pour un problème pécuniaire où se dessine l’incomplétude d’une éthique : c’eût été beau et même grandiose d’abandonner ses droits d’auteur à Présence Africaine pour aider à la publication de nouveaux auteurs africains ou antillais. Mais la France est un pays de droit, où nemo censetur legem ignorare . La parole, fût-elle d’un grand homme, ne suffit pas. Verba volant, scripta manent ! Césaire n’était pas sans le savoir. Pourtant, autour du grand homme, que de scripta inexistants ou perdus, comme cette renonciation, improbable au sens propre ! Que d’écrits disparus, comme la pièce de Suzanne, sa femme…
Subsistent néanmoins ses écrits, de nature à combler bien des lacunes, bien des vides, tels que ceux dont on pouvait observer la vertigineuse profondeur lors du débat de L’Haÿ le 2 octobre 2009.
Une telle ignorance ne date pas d’hier et n’est pas l’apanage des ignares. Patrick Fary-Olax, ancien étudiant de l’université Antilles-Guyane, se souvient : « Chère professeure, je me rappelle qu’à l’époque, en clôture du colloque consacré à la période révolutionnaire aux Antilles qui s’était tenu du 26 au 30 novembre 1986 à la faculté des Lettres et Sciences Humaines de l’Université de La Guyane et des Antilles sise Ravine Touza, des auditeurs (trices) s’étaient rengorgé(e)s d’entendre de la bouche même d’éminent(e)s intervenant(e)s venu(e)s du monde entier "qu’on saurait dorénavant qu’on pense aussi en Martinique", perdant ainsi de vue les conclusions de tou(te)s celles et ceux qui, en particulier dans les anciennes colonies d’Amérique, avaient osé mobiliser positivement leur énergie réflexive, avant et même après Aimé Césaire, contre une logique "moderne" unique s’inspirant notamment de l’angle facial et du chaînon manquant entre l’espèce simiesque et celle humaine des Blan(ch)es... C’était oublier toute la capacité de réflexion de l’être humain qui là comme ailleurs avant et après Aimé Césaire avait réussi à organiser cette pensée (comme la bêtise du reste, celle-ci non plus d’un point de vue scientifique contemporain et non pas celui d’une modernité qui n’a été somme toute que relative, n’a pas de couleur) pour que celle-ci combatte toutes les formes de barbarie. D’où d’ailleurs l’extrême réserve d’Aimé Césaire vis-à-vis de celles et ceux qui par le passé ou au présent voire même à l’avenir ont ou ont eu ou auraient l’idée de faire dire, en particulier à ses écrits, ce qu’il n’aurait pas dit... ».
C’est cette ignorance actuelle que nous nous sommes efforcés de pallier dans l’ouvrage intitulé La crise de l’Outre-mer français . Auparavant, au plus fort de la grande grève, afin que les gens cessent de se demander ce que réclamaient au juste ces mouvements, nous avions présenté les 120 propositions du LKP et diverses analyses des événements du début de l’année dans les DOM dans Guadeloupe & Martinique en grève générale 
contre l’exploitation outrancière et contre la vie chère — Liyannaj Kont Pwofitasyon .
Finalement « la force de regarder demain » de Césaire ne serait-elle pas la force de regarder Césaire en face dès à présent, sans loucher sur des contingences ? Et de lire, de penser Césaire pour mieux panser l’après Césaire en toute autonomie, sans se contenter de voir en Césaire juste une grande figure tutélaire. Tenter d’y puiser, telle une parole d’évangile, de bonne nouvelle au sens étymologique coulant de source, de source pure, cette force-là.
N’a pas encore germé tout ce qui fut planté dans Tropiques, mais la germination s’opère. Nous sommes friands de cette récolte. Cette autre Suzanne, en son temps, n’écrivit-elle pas que « la littérature martiniquaise sera[it] cannibale ou ne sera[it] pas » ? D’une Suzanne à une autre Suzanne en passant par les Roses de L’Haÿ s’est filée la métaphore du jardin de Suzanne Césaire.

Pointe des Nègres — quartier de Fort-de-France, lieu de débarquement des esclaves déportés d’Afrique pendant la traite négrière, où j’écris, libre, aujourd’hui, où je vis, marronne, autant qu’on peut l’être —, en octobre 2009

© Suzanne Dracius 2009

NOTES
Sèbi (ou serbi) : jeu de dés traditionnel pratiqué dans les fêtes populaires en Martinique.

Sizan : Suzanne, en créole.

Suzanne Dracius, Rue Monte au ciel, Fort-de-France : Desnel, 2003.

Aimé Césaire, "Le verbe marronner. Réponse à René Depestre, poète haïtien (éléments d’un art poétique)", Paris : revue Présence Africaine, 1955.

Suzanne Dracius, L’autre qui danse, Paris : Seghers, 1989 ; réédition en poche, Paris : Éditions du Rocher, 2007.

« Le colossal talent de Suzanne Dracius fit l’admiration d’un de nos plus grands hommes de Lettres, Aimé Césaire. Ses lectures réitérées de Rue Monte au Ciel laissèrent des marques indélébiles, signifiant à envisager dans sa valeur double, dénotative et connotative. Son exemplaire de Rue Monte au ciel, abondamment manipulé, porte des traces : pages cornées d’un coup d’ongle empressé, gravées d’annotations ; couverture flétrie par des mains impatientes : a book that has been loved (l’amour d’un livre se mesure au degré de son flétrissement) ! » (Yolande Helm, "Suzanne Dracius ou le marronnage au féminin", Paris : Cultures Sud, Notre Librairie, n° 170 — septembre 2008, pages 57 à 62).

Suzanne Dracius, Lumina Sophie dite Surprise, Fort-de-France : Desnel, 2005.
Cf. note 5 : remarque de Yolande Helm.

Arthur Rimbaud, Lettre à Paul Demeny dite « du Voyant » (15 mai 1871), Correspondance, Oeuvres complètes, Paris : Gallimard, La Pléiade, 1972.

Louis Aragon, Le Fou d’Elsa (1963), Oeuvres poétiques complètes, Paris : Gallimard, La Pléiade, 2007. Et d’ajouter, dans son Commentaire au Fou d’Elsa : « La femme est l’avenir de l’homme, au sens où Marx disait que l’homme est l’avenir de l’homme. »

Suzanne Césaire, Le Grand Camouflage, Paris : Éditions du Seuil, mai 2009.
http://www.bondamanjak.com/martinique/28-a-la-une/8102-image-du-jour-23-septembre-2009.html

« An tan Robè » : au temps de l’amiral Robert, équivalent de l’Occupation en Martinique, pendant la Seconde guerre mondiale.

Béké : descendant de colons français blancs.

« La Martinique et la Guyane sont appelées à se prononcer le 17 janvier 2010 lors d’un référendum sur la question du statut pour plus d’autonomie », dixit France Infos le 7 octobre 2009. En réalité le référendum aura lieu en Martinique le 10 janvier.

J’ai décidé de rendre à César ce qui est à César et au Noir ce qui est au Noir, en lui octroyant une majuscule à lui aussi.

Nemo censetur legem ignorare : Nul n’est censé ignorer la loi.

Verba volant, scripta manent : Les paroles s’envolent, les écrits restent !

Suzanne Dracius, Jean-François Samlong, Gérard Théobald, La crise de l’Outre-mer français, Paris : L’Harmattan, 2009.

Suzanne Dracius et alii, Guadeloupe & Martinique en grève générale 
contre l’exploitation outrancière et la vie chère —
Liyannaj Kont Pwofitasyon, collectif, Fort-de-France : Desnel, 2009.

– Cliquer ici pour lire, traduit en anglais, l’article de Suzanne Dracius "In Search of Suzanne Césaire’s Garden" in Research in African Literatures

Indiana University Press Journals Weblog : Aimé Césaire, 1913-2008.